Assis sur une chaise en plastique thermoformé, il a le regard fixe. Devant ce bouillon de textiles qui s’active dans le hublot, ses idées s’entrechoquent, elles aussi. Il se dit qu’une bonne partie de sa vie est là, devant lui à se débattre. Son vieux jean délavé dont il n’arrive pas à se séparer bataille avec les autres fringues. Ce vieux futal qui porte les stigmates de sa dernière chute de moto. Les poches arrière sont râpées par le bitume, tâchées à jamais. Combien de femmes ont délicatement déboutonné ce pantalon ? Finalement si peu, malgré tout ce temps. Et ses chaussettes, trouées pour la plupart. Il sourit à l’idée qu’il est capable de porter des chaussettes qui laissent largement respirer ses orteils à longueur de journée, mais qu’il n’aime pas faire l’amour autrement que pieds nus. Il se souvient que plus jeune, il avait découpé un petit carré de tissu dans un de ses caleçons pour l’offrir à son amoureuse. Elle l’avait toujours avec elle. Aujourd’hui, ses caleçons sont juste usés, pas découpés. Il y a aussi dans ce tourbillon mousseux des chemises pas toutes jeunes. Jamais il ne les a portées dans le pantalon. Ou alors il y a longtemps. Avec l’âge, elles laissent entrevoir le haut de son torse poilu, doucement blanchi par le temps. Le tambour tourne. L’horloge aussi.