La soirée avait pourtant bien commencé. On s’était retrouvés dans un bar branchouille, pour s’envoyer quelques shoots de vodka caramel en fumant des Camel, l’œil égrillard. Sous les néons noirs, nos petites dents de devant étaient plus blanches que blanches. Les filles arrivaient par grappes, on laissait traîner nos grandes oreilles, avides d’un coup d’avance, et on flambait nos billets de vingt de façon ostentatoire pour s’enivrer encore et encore. Histoire d’atteindre la nécessaire déchéance avant de mettre les pieds en boîte. Une fois arrivés là-bas, on a mis nos fourrures au vestiaire, et on a picolé jusqu’au bout de la nuit, entre deux moon-walk sur le dance-floor. Nous voir glisser comme ça, sur nos petites pattes de derrière, ça faisait toujours son effet… Puis entre deux verres, Garen est sorti prendre l’air. Complètement démonté, les yeux rougis par la fumée et l’excès d’abus, il s’est éclipsé. On ne l’a plus revu.
Il a été retrouvé au petit matin, à quelques centaines de mètres de l’Apocalypse, au milieu de cette route fréquentée par les seuls ouvriers qui viennent de finir leur nuit de labeur et qui vont bien vite mettre la viande dans le torchon. Lui qui nous avait tous invités le week-end d’après pour fêter ses vingt ans…