générations

Putain, ça n’allait pas le faire longtemps. Cette habitude qui s'installait de rentrer complètement déchiré à l’heure où son père se levait pour aller bosser, ça n’allait pas pouvoir durer des semaines et des semaines.

Vers quatre heures du matin, la porte s’ouvrait quand il prenait son café. Dans une heure, il fallait être à l’usine. Pas réveillé, la tête dans le pâté, et cette grande gigue qui débarque avec ses yeux tout rouge et ses gestes maladroits. Ça le mettait hors de lui, lui donnait l’envie d’allumer direct la première Gitane de la journée. Alors il se rongeait les ongles, attendait qu’il s’affale dans son lit et que le silence enfin se fasse. Ce gamin, qui il y a cinq ans encore passait ses journées sur son BMX était en train de devenir un jeune branleur, qui ne foutait rien de ses journées, fumait des pétards, buvait des bières et rentrait à pas d'heure. Il allait vraiment falloir discuter.

Ils se sont donné rendez-vous quelques jours plus tard, en début d’après-midi, à l'heure de la débauche. Ils ont fait quelques pas ensemble, ont longé le square, se sont dit les choses, se sont promis de faire des efforts, chacun de leur côté. Le fils a déchiré un petit bout de carton dans le paquet de Gitanes de son père, et a roulé un bédo qu’ils ont fumé ensemble en marchant le long de la Garonne. Enfin, ils s’étaient compris.

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